Égypte – Accord a minima avec le FMI et nouvelle dévaluation de la livre

Égypte – Accord a minima avec le FMI et nouvelle dévaluation de la livre

En résumé

Les autorités égyptiennes viennent de conclure un accord très attendu avec le Fonds monétaire international (FMI) pour un programme d’aide a minima de 3 milliards de dollars.

Simultanément à cette annonce, la banque centrale a dévalué la livre égyptienne à 23 par dollar, au niveau du cours du marché gris observé sur place. Après la dépréciation de la livre de 20% depuis mars dernier, la dévaluation totale de la devise égyptienne depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine atteint ainsi 34%. Le décrochement brutal de la livre reste donc inférieur par son ampleur à celui de fin 2016 qui avait atteint 50%. Il devrait permettre de protéger le stock de réserves en devises qui était tombé au plus bas à moins de cinq mois d’importations cet été.

En conséquence, la prime de risque (CDS à cinq ans) s’apaise un peu, les marchés actant le soutien financier du FMI et un accord sur l’évolution du régime de change.

Effectivement, sous l’impulsion de son nouveau gouverneur, Hassan Adbullah, la Banque centrale égyptienne (CBE) vient d’annoncer une évolution de sa politique monétaire et de son régime de change, avec l’adoption d’un régime de change flottant, répondant ainsi à une demande récurrente du FMI pour une flexibilité accrue du cours de la livre égyptienne aux lois de l’offre et de la demande. Il semble encore prématuré de confirmer le mode de fonctionnement de ce nouveau régime. Mais la CBE annonce la fin du fonctionnement des couvertures de change par lettre de crédit et la création d’un véritable marché à terme de la devise. Les modalités concrètes de cette nouvelle organisation sont encore inconnues. 

Les taux directeurs ont par ailleurs été relevés de 200 pdb (2%), afin de tenir compte de l’inflation qui a atteint 15% en septembre.

Une des conséquences relativement indésirables de la chute de la devise à court terme est d’ailleurs une relance de l’inflation importée au cours des prochains mois. Celle-ci devrait rester entre 15% et 18% au dernier trimestre de 2022 et s’établir à 13,3% en moyenne pour l’ensemble de l’année 2022.

Une probable réduction des importations est aussi attendue dans les prochains mois en raison de leur renchérissement, ce qui devrait améliorer margi­nalement la balance commerciale. La dévaluation va aussi aider au retour des investissements directs étrangers. Les investisseurs étrangers étaient en position d’attente, un ajustement du change permettant des achats d’actifs à des prix "décotés" plus favorables. 

De son côté, le plan d’aide du FMI, de 3 milliards de dollars, semble modeste en montant. Il devrait être complété par une aide supplémentaire de 1 milliard de dollars et d’un autre soutien parallèle de 5 milliards de dollars de la part d’"institutions internationales", selon le communiqué des autorités. Au total, la somme cumulée des trois plans récents du FMI s’établit à 23 milliards de dollars, soit 5,7% du PIB. Un montant très contenu hors aides bilatérales des pays du Golfe.

Après cette aide du FMI, le montant de la dette externe représente encore le ratio très élevé de 4,3 fois celui des réserves en devises.

Notre opinion –  Ces événements récents sont riches d’enseignements. D’une part, dans ses relations avec le FMI, le montant très contenu de l’aide illustre une nouvelle fois la méfiance des autorités locales envers les conditionnalités exigées par le FMI et sa farouche volonté de garder son indépendance dans sa politique économique. D’autre part, la politique monétaire fait preuve de plus de réalisme et de pragmatisme propre à rassurer les milieux d’affaires. La création d’un marché des changes pourrait effectivement assurer une meilleure prévisibilité économique pour le pays. Enfin, le recours systématique aux dévaluations de la livre et aux espoirs de redressement de la croissance du PIB pour réduire les graves déséquilibres macro-économiques est désormais insuffisant et le pays doit engager des réformes structurelles profondes pour réduire sa vulnérabilité. À ce stade, les annonces faites parallèlement au plan d’aide restent encore assez floues sur les décisions et les moyens mis en œuvre pour améliorer l’équilibre du développement.

Article publié le 28 octobre 2022 dans notre hebdomadaire Monde – L’actualité de la semaine

Égypte – Accord a minima avec le FMI et nouvelle dévaluation de la livre

Sous l'impulsion de son nouveau gouverneur, Hassan Adbullah, la Banque centrale égyptienne (CBE) vient d'annoncer une évolution de sa politique monétaire et de son régime de change, avec l'adoption d'un régime de change flottant, répondant ainsi à une demande récurrente du FMI pour une flexibilité accrue du cours de la livre égyptienne aux lois de l'offre et de la demande. Il semble encore prématuré de confirmer le mode de fonctionnement de ce nouveau régime. Mais la CBE annonce la fin du fonctionnement des couvertures de change par lettre de crédit et la création d'un véritable marché à terme de la devise. Les modalités concrètes de cette nouvelle organisation sont encore inconnues.

Olivier LE CABELLEC, Economiste