Royaume-Uni : les tensions sur les prix et les salaires persistent, nouvelle hawkish pour la BoE

Royaume-Uni : les tensions sur les prix et les salaires persistent, nouvelle hawkish pour la BoE

En résumé

L'inflation CPI recule mais l'inflation sous-jacente reste stable

Le taux d'inflation CPI des prix à la consommation a baissé pour le deuxième mois consécutif en décembre, à 10,5% (en ligne avec les anticipations) après 10,7% en novembre et 11,1% en octobre. Ce ralentissement est favorisé par un effet de base : l'indice enregistre une hausse de 0,4% sur le mois contre 0,5% en décembre 2021.

La composante transport, dont le taux d'inflation baisse pour le sixième mois consécutif (à 6,5% sur un an contre 14,9% en juin), est le principal contributeur au recul de l'inflation en décembre. Sa modération est due à la baisse des prix de l'essence et du diesel, dont le taux d'inflation recule à 11,5% après 17,2% en novembre et contre 43,7% en juillet. D'autres contributions à la baisse du taux d'inflation proviennent des prix des vêtements dont les prix augmentent de 6,5% sur un an (contre 7,5% en novembre), des loisirs et de la culture (4,9% après 5,3%) et des services de communication (2% après 2,6%).

A contrario, les composantes qui ont contribué positivement au taux d'inflation sont les hôtels, cafés et restaurants où les prix augmentent de 11,4% sur un an (contre 10,2% en novembre) ainsi que les produits alimentaires et des boissons non-alcoolisées, où le taux d'inflation atteint un nouveau record à 16,8% et la santé (+5,1% sur un an, contre 4,8% en novembre).      

L'inflation sous-jacente a été stable à 6,3%. L'inflation des biens baisse (à 13,4%) avec une baisse du rythme de hausse des prix des biens industriels hors énergie (à 5,8% contre 6,3% en novembre). Dans le même temps, l'inflation des services grimpe (à 6,8% contre 6,3% en novembre).

Les ventes au détail continuent de chuter

Les ventes au détail ont baissé de 1% en volume en décembre, après -0,5% en novembre. Cette baisse s'explique par les ventes dans les magasins non alimentaires (-2,1%), notamment les magasins non spécialisés (-3,2%), tandis que les ventes de produits alimentaires ont été à peu près stables (-0,1%).

Le volume des ventes au détail reste en-dessous de son niveau pré-Covid de février 2020 (-1,7%). Dans le même temps, les ventes en valeur ont progressé de 13,6% depuis février 2020. Les consommateurs ont donc dépensé (beaucoup) plus pour acheter moins. Sur l'année 2022, le volume des ventes au détail a diminué de 3% par rapport à 2021, après une hausse de 5,2% en 2021.

La confiance des ménages : le pire semble derrière nous

La crise du pouvoir d'achat a continué de peser sur la confiance du consommateur en ce début d'année. L'indice Gfk de confiance du consommateur a baissé à -45 en janvier après trois mois d'amélioration depuis un plus bas de -49 en septembre. Il reste largement inférieur aux niveaux enregistrés pendant les pires mois de la pandémie.

L'appréciation de la situation économique générale au cours des douze derniers mois perd 5 points. Les consommateurs ne sont guère optimistes pour l'économie pour l'année à venir : l'indice correspondant perd 1 point. En revanche, si l'appréciation de la situation financière individuelle passée s'est également détériorée (-3 points), l'optimisme des consommateurs concernant leur situation financière future affiche une légère amélioration (+2 points en janvier par rapport à décembre et +13 points par rapport à septembre).

Signes de détente sur le marché du travail, sans impact à ce jour sur les salaires

Le rapport sur le marché du travail du mois de janvier 2023 (portant sur les statistiques à fin novembre) a continué de faire état d'un marché très tendu, tout en confirmant que son pic devrait être derrière nous. Le taux de chômage a été stable à 3,7% sur les trois mois à fin novembre par rapport aux trois mois à fin octobre. L'économie n'enregistre qu'une légère hausse de l'emploi (+27 000 sur les trois mois à fin novembre par rapport aux trois mois à fin août), insuffisante pour compenser une progression du nombre de chômeurs de 56 000 sur la même période.

Le nombre d'inactifs diminue sur la même période : -55 000 après une hausse de 251 000 sur les trois mois à fin août. Cette baisse s'explique par les 16-24 ans et les 50-64 ans. Il y a eu une baisse du nombre d'inactifs pour raison d'études, de malades de longue durée ou de retraite. Le taux d'inactivité des personnes âgées de plus de 16 ans enregistre ainsi une baisse de 0,2 point à 36,9% par rapport aux trois mois à fin août.

Le nombre de postes vacants a continué de baisser (-75 000) pour le sixième mois consécutif mais, à 1,2 million, il reste toujours anormalement élevé.

Ces signes de détente n'ont pas encore d'impact sur les salaires qui continuent d'accélérer. La croissance des salaires (et de la paie totale) atteint 6,4% sur un an (trois mois à fin novembre) contre 6,1% en octobre (6,2% pour la paie totale). Les salaires accélèrent aussi bien dans le privé (à 7,2%) que dans le public (à 3,3% depuis un plus bas à 1,7% en avril).  

L'inactivité demeure une explication clé du manque de main-d'œuvre que subissent les entreprises depuis la pandémie. Le nombre d'inactifs a crû de 467 000 depuis le T4-2019, un chiffre en légère baisse depuis juillet 2022 lorsqu'il avait dépassé un demi-million (533 000). La majorité de ces inactifs supplémentaires depuis le Covid (405 000) se déclarent malades, principalement de longue durée (363 000).

Notre opinion

La stabilité de l'inflation sous-jacente (grâce notamment à l'accélération des prix dans les services) et cette nouvelle accélération marquée des salaires en novembre sont les développements de la plus grande importance pour la BoE en amont de sa réunion de politique monétaire du 2 février. Ils confortent notre scénario d'un relèvement du taux directeur de 50 points de base (pdb) en février à 4%, le même donc qu'en décembre (contrairement aux anticipations pour la Fed). Les chiffres de l'inflation confirment que le pic est probablement derrière nous, grâce largement à la baisse des prix de l'énergie, mais ne permettent pas de lever les risques de persistance des pressions inflationnistes domestiques. Or, comme l'a expliqué le chef économiste de la BoE, Huw Pill, dans un discours du 9 janvier dernier, c'est précisément cette persistance de l'inflation sous-jacente et de ses moteurs, tels que les salaires et les comportements de fixation des prix des entreprises, qui est au cœur des préoccupations de la BoE. Le marché du travail continue de susciter des pressions sur les salaires qui ne sont en aucun cas compatibles avec la cible d'inflation. Nous nous attendions à une nouvelle hausse du taux de chômage en novembre qui ne s'est pas matérialisée, malgré la détérioration suggérée par les enquêtes.

La forward guidance du MPC stipule que si les perspectives suggèrent des pressions inflationnistes persistantes, cela justifiera un autre resserrement « avec force ». La probabilité d'une hausse de taux de 75 points de base en février a donc augmenté, malgré le recul de l'inflation totale. Ce d'autant plus que les données réelles d'activité ont surpris positivement en novembre, suggérant que l'économie britannique pourrait éviter une récession technique au T4. Il est toutefois peu probable qu'une majorité des membres du MPC soit favorable à une hausse de 75 points de base, seule Catherine L. Mann avait voté pour une telle décision en décembre dernier.


Article publié le 20 janvier 2023 dans notre hebdomadaire Monde – L'actualité de la semaine

Royaume-Uni : les tensions sur les prix et les salaires persistent, nouvelle hawkish pour la BoE

La forward guidance du MPC stipule que si les perspectives suggèrent des pressions inflationnistes persistantes, cela justifiera un autre resserrement « avec force ». La probabilité d'une hausse de taux de 75 points de base en février a donc augmenté, malgré le recul de l'inflation totale. Ce d'autant plus que les données réelles d'activité ont surpris positivement en novembre, suggérant que l'économie britannique pourrait éviter une récession technique au T4. Il est toutefois peu probable qu'une majorité des membres du MPC soit favorable à une hausse de 75 points de base, seule Catherine L. Mann avait voté pour une telle décision en décembre dernier.

Slavena NAZAROVA, Economiste - Royaume-Uni, Pays scandinaves et Irlande