Prix alimentaires – Scénario 2023-2024 : signes de décrue

Prix alimentaires – Scénario 2023-2024

En résumé

En décembre 2022, au sein de l'Union européenne, les prix à la consommation ont progressé de 10,4% (sur douze mois). Les produits alimentaires ont, pour leur part, augmenté de 18,2%. L'inflation s'est d'abord nourrie de la crise énergétique, en voie de normalisation au printemps 2023. Mais les distorsions de prix propres aux filières alimentaires prennent désormais le relais. 

En France, le caractère cumulatif, auto-entretenu, des hausses de prix alimentaires a marqué l'année 2022 : parties de 0,16% en janvier, elles terminent à 12,6% en décembre (prix alimentaires Insee IPA, douze mois). En mars 2023, on observe un premier mouvement de modération simultanée de l'indice général et de de l'indice alimentaire. On veut croire que les données de mars-avril 2023 annoncent le reflux : pour l'Insee, entre avril et mai, l'indice général des prix à la consommation passe de 5,9% à 5,1% en mai et l'indice des prix alimentaires de 15% à 14,3%. Première inflexion depuis quatorze mois, la statistique professionnelle qui suit spécialement les produits de grande consommation (PGC) confirme une hausse de 16% en mai (id. glissement sur douze mois). 

En 2022 et sur le premier trimestre 2023, les acteurs des filières alimentaires se transmettent l'inflation "importée" de l'amont vers l'aval, une transmission qui reflète la nécessité d'absorber de fortes hausses de coûts amont, externes aux filières : énergie, puis intrants agricoles, constitution de stocks, produits d'emballage. Le mécanisme des négociations commerciales obligatoires (NCA) intervient, ralentissant les décisions, dans un environnement certes incertain : les négociations sont closes fin février 2023, mais les prix augmentent encore en mars et avril.

Dans ce chaînage, agriculture – industrie agroalimentaire – distribution, les produits agricoles d'origine française ont partiellement bénéficié du dispositif des lois EGAlim (non-négociabilité de certains prix agricoles). À l'échelon suivant d'amortir le choc. Certaines industries agro-alimentaires ont mentionné une incidence-prix de l'ordre de 7% (prix fournisseur à la distribution). En bout de chaîne, l'indice PGC atteint 16,2% en mars, croît faiblement en avril (16,4%), enregistre son premier fléchissement en mars (16%). Il était temps : le prix consommateur des produits de référence devenait dissuasif. 

Quelle que soit l'évolution future de ces prix d'offre, les consommateurs ont déjà sensiblement changé leurs habitudes :

  • Les achats alimentaires baissent en volume – c'est sans précédent ;
  • Les consommateurs se réorientent vers les offres marques de distributeurs (MDD), voire les "premiers prix". Les ventes bio en 2022 enregistrent une chute accélérée (-6%) qui confirme que le prix est prioritaire. Les instruments de mesure peinent à suivre : références, panels, sont-ils toujours pertinents ? 

Face à ces enjeux, les filières ont été fortement incitées à revisiter les pactes commerciaux des négociations 2022-2023. Il s'agit de faire "re-circuler" les coûts des intrants en révision des prix, cette fois-ci à la baisse, entre deux périodes de NCA. Ce mouvement d'accords de prix à rebours s'est nécessairement enclenché, ne serait-ce que pour des motifs de concurrence, au niveau de la grande distribution en particulier. La manœuvre est lente en raison, notamment, de la durée de liquidation des stocks constitués au plus haut.

Si les prix de l'énergie restent stables, on assistera cette année à une modération des prix alimentaires : effet de base d'abord (pic des prix énergie fin 2022), amplifié ensuite par des renégociations de plus en plus actives sur les intrants matières premières. L'inflation alimentaire pourrait ainsi diminuer de moitié d'ici à la fin de l'année (mai 2023 : 14,3%, décembre : 7,5% – Insee).

Article publié le 30 juin 2023 dans notre trimestriel Monde – Scénario macro-économique 2023-2024 : : une "normalisation" laborieuse
 

Prix alimentaires – Scénario 2023-2024

Si les prix de l'énergie restent stables, on assistera cette année à une modération des prix alimentaires : effet de base d'abord (pic des prix énergie fin 2022), amplifié ensuite par des renégociations de plus en plus actives sur les intrants matières premières. L'inflation alimentaire pourrait ainsi diminuer de moitié d'ici à la fin de l'année (mai 2023 : 14,3%, décembre : 7,5% – Insee).

Noël ISORNI, Ingénieur-Conseil