Italie – 2022 : la croissance résiste
- 13.03.2023
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En résumé
Après avoir nettement rebondi en 2021 (+7,0%), l'économie italienne fait preuve de résilience, enregistrant une croissance du PIB en volume de 3,8%1 en 2022. Ces résultats sont à mettre en perspective avec les différents chocs et le climat d'incertitude auxquels l'économie a été confrontée cette année. En particulier, le conflit russo-ukrainien et la crise énergétique, qui en a découlé, a entraîné de fortes tensions sur les prix et sur les approvisionnements. Le taux annuel d'inflation mesuré par l'IPCH a atteint 8,2%. Par ailleurs, le pays a dû faire face à une crise gouvernementale ayant entraîné l'élection anticipée d'un nouveau gouvernement en septembre dernier. La croissance de 2022, en ligne avec nos dernières prévisions, reste ainsi largement supérieure au rythme d'avant pandémie et se démarque de ses voisins européens. Sur l'année, le PIB a enregistré une croissance positive au cours des trois premiers trimestres avec une progression très soutenue au T2, avant de ralentir et d'afficher un premier léger repli au T4 (-0,1%).
En 2022, la croissance italienne a été portée par la consommation privée qui a progressé de 4,6% sur un an. La demande intérieure (hors stocks) contribue à hauteur de 4,7 points de pourcentage (pp) à la croissance du PIB. Malgré cette progression, la consommation privée n'a toujours pas recouvré son niveau d'avant pandémie. La consommation de biens semi-durables et de services a accéléré, alors que celle de biens durables et de biens non durables a ralenti nettement. Les deux premières catégories ont notamment bénéficié d'un rattrapage post-pandémie lié à la fin des restrictions.
L'État a également mis en place plusieurs mesures, afin de soutenir le pouvoir d'achat des ménages dans un contexte de hausse des prix. Après une croissance positive aux T2 et T3, la dépense des ménages montre toutefois les premiers signes d'un essoufflement au T4, marquée par un repli de 1,6% sur le trimestre, sous l'effet de la progression de l'inflation (+5,4% en glissement trimestriel – g.t.) et de l'expiration de certaines mesures de soutien au pouvoir d'achat à fin 2022. L'investissement a été le deuxième moteur de la croissance en 2022, fournissant une contribution de 1,9 pp à la croissance avec une progression de 9,7%, un rythme élevé mais plus normalisé par rapport à 2021 (+18,6%).
L'investissement a été particulièrement dynamique au T1 avant de ralentir, enregistrant une croissance quasi nulle au T3 et de rebondir au T4 (+2%). Malgré une perte de vitesse, l'investissement dans la construction a crû au rythme de 12,2% et l'investissement productif au rythme de 8,6% en 2022. L'accumulation de capital a notamment été soutenue par différents projets d'investissement public inclus dans le Plan de relance et de résilience (RRP) italien. Les tensions sur les prix et les approvisionnements, ainsi que le resserrement monétaire opéré par la BCE depuis le printemps, ont toutefois bridé sa progression.
Les échanges extérieurs, particulièrement affectés par la crise énergétique, ont quant à eux contribué négativement à la croissance. Les importations et les exportations en volume ont ralenti, affichant une croissance respective de 12,5% et de 10,2%. Malgré la baisse des importations (-1,7% en g.t.) et le rebond des exportations (+2,6% en g.t.) au T4, la balance commerciale reste déficitaire pour le quatrième trimestre consécutif. Sur l'année, l'effet volume n'a pas permis de compenser la hausse des prix de l'énergie et des matières premières importées. La balance commerciale a enregistré pour la première fois depuis dix ans un déficit qui s'établit à 30 milliards d'euros. Par ailleurs, le déficit de la balance énergétique s'est creusé à 111,3 Mds€ (contre 40 Mds€ en 2021). Les variations de stocks ont également contribué négativement à la croissance à hauteur de -0,2 pp. Alors que les entreprises ont constitué des stocks au cours des trois premiers trimestres, elles ont procédé à un important déstockage au cours du T4, en réponse à la contraction de la demande, ce qui a induit un recul de la production.
La progression de la valeur ajoutée a accéléré à 4,8% (après +4,7% en 2021) dans le secteur des services. Elle a également augmenté dans le secteur de la construction (+10,9%), mais à un rythme moins soutenu que l'année précédente (+20,7%). Après un rebond de 12,6% en 2021, la valeur ajoutée de l'industrie (énergie incluse) n'a crû que timidement (+0,46%).
Comme attendu, l'Italie a été contrainte de revoir son déficit public à la hausse (8,0% en 2022) un niveau largement supérieur à celui initialement prévu par le gouvernement (5,6%). Les déficits des années précédentes ont également été révisés à 9,0% pour 2021 (contre 7,2% auparavant) et à 9,7% pour 2020 (contre 9,5%). Ces révisions tiennent compte d'une nouvelle directive introduite par Eurostat en février, qui impose aux États membres de comptabiliser les crédits d'impôt dans leur budget au moment de leur accord et non plus au moment de leur impact réel sur les recettes fiscales. Le gouvernement italien a donc dû réintégrer dans ses budgets 2020-2022 les dépenses de crédit d'impôt octroyés dans le cadre du dispositif fiscal « Superbonus » débuté en 2020. Cette révision ne devrait cependant pas affecter la solidité budgétaire du pays, puisqu'elle modifie davantage la temporalité du traitement comptable de dépenses qui auraient été comptabilisées dans les prochains budgets. Par ailleurs, le gouvernement a introduit un certain nombre de restrictions, telles que la réduction du montant des crédits d'impôt de 110% à 90% et la soumission à condition de ressources, afin de limiter les dépenses fiscales supplémentaires liées à ce dispositif. Le ratio dette/PIB a diminué à 144,6% du PIB en 2022, un niveau inférieur à celui attendu. Malgré la baisse du déficit primaire et de l'endettement net sur la période, la dette publique augmente légèrement à 2 762 Mds€ (contre 2 678 Mds€ en 2021), sous l'effet de la hausse des taux. La réduction du poids de la dette a ainsi été tirée par l'évolution de la croissance économique.
Notre opinion – L'économie italienne a fait preuve de résilience en 2022, en dépit d'un environnement marqué par une série de chocs et d'incertitudes. La croissance économique a notamment été portée par la consommation et l'investissement. Le quatrième trimestre montre toutefois les premiers signes d'un essoufflement de l'activité, en particulier de la consommation qui affiche un premier recul.
Le ralentissement de l'économie devrait se poursuivre au premier trimestre 2023, mais de manière assez contenue. Alors que l'IPCH a diminué en janvier (-1,4% sur un mois), il rebondit légèrement en février (+0,2%). Les indicateurs avancés signalent une détérioration du climat économique2 dans le secteur des services et de la construction sur le mois de février, les entreprises faisant état de leurs craintes quant à la demande future. Le climat économique de l'industrie est, quant à lui, resté stable. De son côté, la confiance des ménages ne faiblit toujours pas, affichant une nette amélioration en février. Les consommateurs perçoivent aussi bien une amélioration du climat économique actuel que du climat économique futur.
Article publié le 10 mars 2023 dans notre hebdomadaire Monde – L'actualité de la semaine
1 Quatre trimestres cumulés – données désaisonnalisées
2 Indice de climat économique ISTAT

Le ralentissement de l'économie devrait se poursuivre au premier trimestre 2023, mais de manière assez contenue. Alors que l'IPCH a diminué en janvier (-1,4% sur un mois), il rebondit légèrement en février (+0,2%). Les indicateurs avancés signalent une détérioration du climat économique dans le secteur des services et de la construction sur le mois de février, les entreprises faisant état de leurs craintes quant à la demande future. Le climat économique de l'industrie est, quant à lui, resté stable. De son côté, la confiance des ménages ne faiblit toujours pas, affichant une nette amélioration en février. Les consommateurs perçoivent aussi bien une amélioration du climat économique actuel que du climat économique futur.
Clara BULTEAU, Economiste (Alternante)