Parlons COP, parlons COP28, en route pour Dubaï

Parlons COP, parlons COP28, en route pour Dubaï

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La 28e édition de la réunion des États parties à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC), connue sous le nom de COP (Conference of the Parties), a lieu à Dubaï, du 30 novembre au 12 décembre. Cette édition est particulièrement attendue du fait de l’urgence climatique mais elle est également contestée de par sa localisation. En effet, les Émirats arabes unis occupaient en 2021 la 6e place mondiale en termes d’empreinte carbone par habitant et sont le 8e pays mondial en termes d’émission de CO21. De plus, la présidence de la COP28 est controversée, puisqu’elle sera assurée par le Sultan Ahmed al-Jaber, à la fois ministre de l’Industrie du pays et PDG de la compagnie pétrolière nationale, une première dans l’histoire de la COP. Par ailleurs, les échecs en matière d’actions concrètes pour le climat depuis la COP21 créent des attentes très élevées. Dans ce contexte, cette COP28 pourra-t-elle démontrer son efficacité en abordant des sujets à la hauteur du défi climatique ?

Le sommet de la Terre de Rio de Janeiro et la naissance de la COP

La 3e édition du sommet de la Terre au Brésil, organisée par les Nations unies en 1992 pour discuter des politiques mondiales en matière de développement durable, a marqué une révolution de la réflexion autour des grands axes du développement durable. Cette édition a en effet scellé une vision mondiale sur le climat à travers la définition officielle du terme « développement durable » et la création de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC) reconnaissant l’existence d’un dérèglement climatique causé principalement par l’activité humaine. Cette convention, connue sous le nom de convention sur le climat ou COP, ratifiée par 198 pays, a pour mission de surveiller l’évolution et l’impact des changements climatiques tout en définissant une série d’objectifs à atteindre et la mise en œuvre de solutions afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES)2.

Un historique marqué par peu de décisions concrètes

De la COP1 en 1995 à Berlin (Allemagne) à la dernière COP27 de Charm el-Cheikh (Égypte), peu de mesures concrètes ont été prises par les pays signataires. Toutefois, certaines COP ont su se démarquer par l’ampleur des mesures et décisions prises.

  • Le protocole de Kyoto en 1997 (COP3). Cette COP représente un premier jalon important et a été marquée par la mise en place d’un protocole visant à réduire de 5,2% les émissions des principaux GES planétaire d’ici à 2012 par rapport au niveau de 1990. Le protocole a été ratifié en 2002 et est entré en vigueur en 2005. 
  • L’accord de Copenhague en 2009 (COP15). Considérée par plusieurs experts comme étant la COP de la dernière chance ou la COP de la prise de conscience, la COP15 a été marquée, d’une part, par l’objectif collectif des pays signataires de la convention de limiter le réchauffement de la planète à +2 °C par rapport à 1850 et, d’autre part, par la mise en place d’une aide annuelle de 100 milliards de dollars entre 2020 et 2025 pour l’action climatique dans les pays en voie de développement.
  • L’accord de Paris en 2015 (COP21). À ce jour considérée comme la COP du climat, elle s’est distinguée par l’engagement de la communauté internationale afin de maintenir le réchauffement climatique (hausse de température) en dessous de +2° C, voire de le limiter à +1,5 °C d’ici à 2100 par rapport à 1850.
  • La COP de Charm el-Cheikh en 2022 (COP27). Si elle est qualifiée d’historique, c’est principalement dû à l’engagement des États signataires de la convention de créer un fonds de pertes et dommages3 afin de compenser les effets irréversibles des dégâts causés par le changement climatique dans les pays les plus vulnérables.

Quel bilan aujourd’hui ?

Les experts du GIEC4 sont unanimes : pour atteindre l’objectif de l’accord de Paris, l’un des scénarios probables serait de réduire de 45% les émissions de GES et de ramener les émissions mondiales de CO2 à zéro d’ici 2030. Or, les stratégies actuelles de réduction des émissions de GES des États, qui conduisent à un scénario de réchauffement global de +1,5 °C d’ici à 2030 et de +2,8 °C d’ici à 2100, sont bien loin de l’objectif visé5. Ainsi se pose la question de la nature opérationnelle des décisions prises. En effet, suite à l’accord de Paris, aucune stratégie concrète n’a été établie de manière commune en faveur d’une limitation du réchauffement climatique. Les décisions autour de l’utilisation des énergies fossiles, principales sources du réchauffement climatique, restent par exemple très vagues. À ce jour, aucune mesure concernant la sortie des énergies fossiles n’a été annoncée, si ce n’est d’inciter les États à réduire leurs émissions de GES et d’arrêter progressivement l’exploitation de charbon. Par ailleurs, le fonds de pertes et dommages, dont l’engagement a été pris lors de la COP27, n’est à ce jour pas encore opérationnel du fait d’un bras de fer entre les pays du Nord et les pays du Sud, tant sur le montant de l’enveloppe que sur la structure en charge d’héberger ces fonds. Enfin, l’engagement pour le fonds d’un montant de 100 milliards de dollars, décidé lors de la COP15, n’est toujours pas atteint6

La COP28, une COP plus opérationnelle ? 

Si, pour l’heure, il est difficile de prédire exactement le contenu de la COP28, le constat est quant à lui clair, les politiques actuelles des États adhérents à la convention ne permettront pas de limiter la hausse des températures en dessous de 2 °C d’ici 2100. Ainsi, comme déclaré par le Sultan Ahmed al-Jaber, cette COP sera l’occasion de mettre l’accent sur le bilan mondial de la transition énergétique et la solidarité entre les pays. À quoi peut-on donc s’attendre concrètement durant cette COP ?

Deux volets semblent se dessiner : tout d’abord, un bilan climatique7 depuis l’accord de Paris et, dans un second temps, des décisions plus opérationnelles sur les moyens à mettre en œuvre afin de limiter le réchauffement.

Le deuxième volet nous semble primordial et doit, selon notre analyse, utiliser les résultats du bilan préalable comme levier d’action. Ainsi, l’établissement d’un agenda énergétique sur la réduction et la sortie des énergies fossiles pourrait être une priorité. Par conséquent, la question autour de l’incitation et du déploiement massif des énergies renouvelables pour accompagner cet agenda serait alors abordée de pair avec les discussions relatives aux nouvelles technologies et notamment la capture du carbone. L’incitation à une coopération plus étoffée et étroite entre les pays du Sud et ceux du Nord pour la mise en place du fonds annoncé lors de la COP27 sera également l’une des priorités. Enfin, la création d’un organisme de suivi des actions en corrélation avec les décisions prises et les objectifs définis n’est pas à exclure durant cet événement.

Que retenir ?

Au fil des éditions, la COP s’est imposée comme étant l’événement majeur de prises de décisions communes en ce qui concerne le climat. Pour cette 28e édition, le constat qui en ressort est l’urgence d’action. Les objectifs définis en matière de climat lors du protocole de Kyoto et de l’accord de Paris ne sont plus réalistes, voire impossibles à atteindre avec la trajectoire d’émission actuelle. Par ailleurs, la création du fonds de soutien en 2022 à Charm el-cheikh peine à trouver une issue favorable. Cette situation est liée à l’absence de décisions concrètes et opérationnelles afin d’atteindre les objectifs. Les stratégies définies par les États membres de la convention, prises individuellement, ne suffisent pas. Pour y arriver, il faudra que les États membres travaillent de concert et redoublent d’efforts afin, qu’à l’issue des discussions, des stratégies claires, définies, chiffrées, réalistes et adéquates soient associées à des objectifs concrets. En résumé, il faudra, dès maintenant, des COP d’actions plutôt que des COP politiques et c’est en ce sens que la COP28 est particulièrement attendue.
 

  1. 21,8 tonnes de CO2/habitant pour l’empreinte carbone et 672 millions de tonnes de CO2/an pour les émissions de CO2
  2. Plus concrètement, il s’agit de prendre des mesures par le biais de textes pour limiter le réchauffement climatique principalement dû aux GES par rapport au niveau de 1990
  3. Les détails du fonds restent à définir et sont prévus pour fin 2023
  4. GIEC (Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat)
  5. Se référer au 6e rapport du GIEC publié en mars 2023
  6. Seulement 83 milliards de dollars sont actuellement disponibles
  7. Il faudra prévoir des échanges autour de l’état des lieux en ce qui concerne la situation climatique mondiale actuelle, les objectifs & stratégies communes, les stratégies & efforts individuels des États membres, le développement des ENR et l’avancée des discussions pour la création du fonds définis lors de la COP27.
Parlons COP, parlons COP28, en route pour Dubaï

Si, pour l’heure, il est difficile de prédire exactement le contenu de la COP28, le constat est quant à lui clair, les politiques actuelles des États adhérents à la convention ne permettront pas de limiter la hausse des températures en dessous de 2 °C d’ici 2100. Ainsi, comme déclaré par le Sultan Ahmed al-Jaber, cette COP sera l’occasion de mettre l’accent sur le bilan mondial de la transition énergétique et la solidarité entre les pays.

Morifing BAMBA, Ingénieur-conseil Énergie