France – Le climat des affaires n'est pas au beau fixe, quelles implications pour la croissance ?

France – Le climat des affaires n'est pas au beau fixe, quelles implications pour la croissance ?

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L'Insee a publié la semaine dernière le climat des affaires du mois d'octobre. L'indicateur synthétique tiré des enquêtes de conjoncture, qui résume la façon dont les chefs d'entreprise voient la conjoncture, s'inscrit en baisse par rapport à septembre (-2 points à 98). Il passe ainsi en-dessous de sa moyenne de longue période (100). Dans le détail, le climat des affaires est en baisse dans l'ensemble des secteurs d'activité. Faut-il donc s'attendre à un orage pour l'économie française ? Si cette nouvelle n'est pas bonne, elle n'est pas annonciatrice d'une récession.

Dans l'industrie, le climat des affaires évoluait déjà sous sa moyenne de long terme depuis août, et il baisse légèrement en octobre (-1 point à 98), principalement en raison de la dégradation du solde d'opinion sur les perspectives personnelles de production. Le climat des affaires fléchit à nouveau dans les services (-1 point) du fait de la dégradation du jugement sur les perspectives du secteur, et il atteint son plus bas niveau depuis avril 2021, restant toutefois au niveau de sa moyenne de longue période. Dans le bâtiment, le climat des affaires se dégrade aussi (-2 points à 103) en lien avec les soldes d'opinion (1) sur l'activité passée et prévue, mais reste au-dessus de sa moyenne de long terme, avec des carnets de commande estimés à plus de 8 mois de production (contre 6 en moyenne historique). Enfin, dans le commerce de détail (y compris commerce et réparation d'automobiles), le climat des affaires se dégrade fortement (-5 points à 98) en raison du jugement sur les intentions de commandes et les perspectives générales d'activité du secteur, passant sous sa moyenne de longue période.

Si le recul du climat des affaires global et son passage sous sa moyenne de longue période ne sont pas de bonnes nouvelles pour l'économie française, ils sont cependant à relativiser. En effet, le niveau moyen de long terme n'est pas le seuil de retournement de l'activité et serait associé en moyenne à une croissance positive (2). Un climat des affaires sous ce niveau n'indique donc pas forcément une baisse de l'activité. Celui d'octobre reste par ailleurs très proche de sa moyenne de long terme, loin du niveau identifié empiriquement comme le seuil de retournement de l'activité (autour de 80). En outre, du côté des bonnes nouvelles, le climat de l'emploi reste au-dessus de sa moyenne de longue période malgré son léger repli en octobre (-1 point à 104), ce qui montre la résilience du marché du travail face au ralentissement de l'activité.

NOTRE OPINION – Les résultats des dernières enquêtes de conjoncture ne remettent pas en cause notre prévision de croissance annuelle pour la France en 2023 (+0,9%), basée sur une croissance qui resterait faible aux 3e et 4e trimestres (avec un acquis de croissance pour 2023 proche de +0,8% à l'issue du 1er semestre). Dans l'enquête trimestrielle de conjoncture dans l'industrie (qui complète l'enquête mensuelle), les chefs d'entreprises anticipent en octobre une baisse de leurs prix de vente pour les trois prochains mois, et ce pour la première fois depuis avril 2020. Si la baisse anticipée est modeste (-0,2%), elle conforte notre diagnostic d'un reflux de l'inflation en fin d'année qui pourrait participer à un rebond de la consommation des ménages. Il faut toutefois espérer que le niveau actuellement bas de la confiance des ménages et le climat d'incertitude alimenté par les tensions géopolitiques ne pèsent pas trop sur cette reprise.


notes :
(1) Un solde d'opinion est l'écart entre le pourcentage pondéré des réponses « supérieur à la normale » ou « en hausse » et celui des réponses « inférieur à la normale » ou « en baisse ».
(2) Voir par exemple le « Guide pratique des enquêtes de conjoncture & protocole de prévision en temps réel », Louise Phung, Documents de travail de la Direction générale du Trésor (octobre 2023).


Article publié le 20 octobre 2023 dans notre hebdomadaire Monde – L'actualité de la semaine

 

France – Le climat des affaires n'est pas au beau fixe, quelles implications pour la croissance ?

Si le recul du climat des affaires global et son passage sous sa moyenne de longue période ne sont pas de bonnes nouvelles pour l'économie française, ils sont cependant à relativiser. En effet, le niveau moyen de long terme n'est pas le seuil de retournement de l'activité et serait associé en moyenne à une croissance positive. Un climat des affaires sous ce niveau n'indique donc pas forcément une baisse de l'activité.

Marianne PICARD, Economiste - France, Belgique et Luxembourg