Royaume-Uni – Forte révision à la hausse de la croissance post-Covid

Royaume-Uni – Forte révision à la hausse de la croissance post-Covid

En résumé

L'institut des statistiques nationales britanniques ONS a créé la surprise au début de septembre en publiant un communiqué qui signale que des révisions significatives de la croissance du PIB en 2020 et 2021 seront publiées plus tard cette année dans les comptes nationaux de 2023 (également connu sous le nom de Blue Book 2023). Selon les nouvelles estimations, le Royaume-Uni aurait connu une contraction légèrement moins forte de son économie en 2020 qu'estimé précédemment (-10,4% au lieu de -11%), suivie d'un rebond nettement plus fort en 2021 (8,7% au lieu de 7,6%), de telle façon que son PIB réel se situerait 0,6% au-dessus de son niveau pré-Covid au quatrième trimestre 2021 (contre 1,2% en-dessous estimé précédemment).

Ces résultats seraient dus à plusieurs changements méthodologiques, incluant l'application d'une nouvelle méthodologie d'estimation de l'impact de la pandémie sur les chaînes d'approvisionnement globales, des améliorations apportées aux calculs des déflateurs et l'intégration de nouvelles données permettant d'améliorer la comparabilité internationale.

En 2020, la comptabilisation des variations de stocks était difficile. L'ONS estime qu'au lieu d'avoir déstocké durant cette période, les entreprises ont en réalité constitué des stocks ce qui a eu pour conséquence une hausse des stocks de 2,5 Mds £ contre une baisse de 11,4 Mds £ annoncée précédemment. En 2021, la révision assez significative de la croissance du PIB serait due à un fort réajustement à la hausse de la consommation des ménages grâce à des informations plus complètes dans certains secteurs. Nous devons attendre la prochaine publication des comptes nationaux trimestriels le 29 septembre prochain pour connaître le détail précis de la décomposition du PIB par dépenses.

En termes de secteurs, la croissance dans les services a été révisée à la hausse de 3,9 points de pourcentage (pp) à 10,9% pour 2021. Les plus fortes contributions sont celles des activités de la grande distribution et de la vente au détail, qui ont contribué conjointement pour 2 pp à la révision. La seconde plus forte contribution a été celle des services de santé avec une contribution de 1,2 pp à la révision, reflétant la reprise des services de santé « réguliers », la poursuite des activités de tests et de traçage et la mise en œuvre de la campagne de vaccination. Par conséquent, le taux de croissance de l'ensemble des services au contact direct avec la clientèle a connu une révision à la hausse en 2021. Au quatrième trimestre 2021, l'écart de leur niveau d'activité par rapport à la période pré-Covid est estimé à présent à -8% contre -11,1% précédemment.

Contrastant avec ces évolutions plus favorables dans le secteur tertiaire, le taux de croissance du secteur industriel a quant à lui subi une forte révision à la baisse pour 2021. Après une hausse de 2,3% en 2020 (contre 1,2% estimé précédemment) le secteur s'est contracté de 3,9% en 2021, au lieu d'avoir progressé de 7,3%. Les quatre sous-secteurs contribuent tous à cette révision négative mais c'est le secteur manufacturier qui y participe le plus : sa progression en 2021 n'est plus que de 1,6% contre 9,7% dans les estimations précédentes. Cette reprise post-pandémique beaucoup plus lente qu'estimé précédemment est le résultat d'une baisse relativement généralisée de la production manufacturière à travers presque tous les sous-secteurs (à l'exception des produits alimentaires et des textiles, qui ont vu leurs volumes de production révisés fortement à la hausse). La production de métaux de base et de produits métalliques et celle d'équipement électriques et de produits chimiques ont connu les révisions les plus fortes, des baisses de leur production ayant été compensées par des importations. Le secteur de l'électricité et du gaz a également subi une révision significative à la baisse : pour 2020 il aurait connu selon l'estimation actuelle une baisse de 32,1% contre une hausse de 5,1% précédemment.
 

Article publié le 8 septembre 2023 dans notre hebdomadaire Monde – L'actualité de la semaine

Royaume-Uni – Forte révision à la hausse de la croissance post-Covid

Ces révisions positives des chiffres de croissance pour 2020 et surtout pour 2021 (l'année du Brexit) ne reflètent pas nécessairement un moindre impact du Brexit sur l'économie : les éléments donnés par l'ONS suggèrent surtout un rebond post-pandémique plus fort de la consommation des ménages, notamment dans les magasins, lié à l'assouplissement des contraintes sur la mobilité des personnes. Ce rebond de la demande ne semble pas avoir été satisfait par une hausse de la production domestique, celle-ci étant à présent estimée avoir baissé en 2021. Il a dû donc être satisfait soit par un mouvement de déstockage plus marqué (ce qui serait compatible avec le mouvement en sens inverse en 2020) et/ou par des importations de marchandises plus élevées. Dans ce dernier cas, le constat curieux qui avait été fait de l'impact du Brexit sur les échanges de biens avec l'UE dans les mois suivant la mise en place de l'accord de retrait ‒ à savoir une reprise plus lente des importations que celle des exportations (en dépit de l'asymétrie dans la mise en place des contrôles douaniers) après le choc immédiat en janvier 2021 ‒ pourrait donc changer quelque peu. Sur le plan international, si les rythmes de croissance des autres pays ne sont pas révisés, les nouveaux chiffres du PIB britannique pour 2020 et 2021 impliquent que le PIB réel au T2-2023 se situe 1,6% au-dessus de son niveau du T4-2019, proche de la performance de la France.

Slavena NAZAROVA, Economiste - Royaume-Uni, Pays scandinaves et Irlande