La Chine n'est pas le Japon des années 1980 et c'est à la fois une bonne nouvelle et un grand problème

La Chine n'est pas le Japon des années 1980 et c'est à la fois une bonne nouvelle et un grand problème

 

  • Quels sont les points communs entre la Chine et le Japon des années 1980 ?
  • Le pilotage de la trajectoire de croissance en économie administrée
  • La Chine d aujourd'hui n'est cependant pas le Japon de 1990
  • Trois éléments jouent en revanche contre la Chine
  • Du cas japonais, trois leçons principales peuvent être tirées
  • La « japonisation » : un moindre mal face à d'autres scénarios plus brutaux ?

En résumé

Crise immobilière, problèmes démographiques, tensions commerciales avec les États-Unis, niveau de la dette inquiétant : les points de comparaison entre la Chine actuelle et le Japon des années 1980 sont nombreux et font redouter un scénario de "japonisation" de l'économie chinoise. Ce dernier se caractérise par un ralentissement de l'activité provoqué par une baisse de la consommation privée, le déclenchement d'une boucle prix-salaires négative alimentant la déflation, un recul de la croissance potentielle.

Or, le Japon ne s'est jamais vraiment remis de sa « décennie perdue » : ce pays, que les économistes des années 1980 voyaient devenir la première puissance économique mondiale, a finalement connu près de vingt ans de stagnation de sa croissance et de ses prix.

La Chine n'est pas le Japon des années 1980 et c'est à la fois un avantage et un problème. Un avantage, car elle dispose de marges de manœuvre plus étendues dans la conduite de ses politiques économiques. Un problème, car son niveau de développement et de richesse – et donc de résilience – est bien moins élevé et l'expose à des scénarios finalement plus brutaux.

Du Japon, la Chine pourrait néanmoins tirer des leçons afin de ne pas reproduire les mêmes erreurs. À commencer par l'adoption d'une communication claire et transparente sur les politiques menées pour réancrer les anticipations et redonner confiance.

Si les parallèles sont séduisants, si des leçons peuvent être tirées, la nature du régime chinois et le resserrement autour du Parti et de son leader Xi Jinping font cependant que la Chine ne ressemblera jamais totalement au Japon, des années 1980 ou d'aujourd'hui. Et que les obstacles à surmonter pour relancer sa trajectoire de croissance sont encore loin d'être surmontés.

 

La Chine n'est pas le Japon des années 1980 et c'est à la fois une bonne nouvelle et un grand problème

Les trois caractéristiques du Japon des années 1990 sont la conjonction d'une faible croissance, d'une faible inflation et de taux d'intérêt bas, dans un contexte de tensions commerciales avec les États-Unis, d'appréciation du yen et de vieillissement accéléré de la population. Le parallèle avec la Chine actuelle est donc loin d'être absurde. Surtout, la stratégie de croissance japonaise relevait d'un modèle de développement fondé sur les exportations et la remontée des filières (modèle dit « en vol d'oies sauvages »), des taux d'investissement et d'épargne élevés et un mode de financement par les banques plutôt que par les marchés. Des caractéristiques très similaires à ce que l'on a pu observer en Chine, surtout à partir de l'entrée du pays dans l'OMC en 2001.

Sophie WIEVIORKA, Economiste - Asie (hors Japon)