Géopolitique – La Russie face à la guerre longue
- 05.11.2024
- 0
- Télécharger la publication (PDF - 712,99 KB)
- La guerre d'attrition déforme l'économie
- La militarisation de l'économie met les capacités de production sous tension
- La redistribution des revenus impacte la façon dont les sanctions sont perçues
- L'inflation, symptôme de l'économie en guerre
- Des arbitrages de dépenses qui vont faire évoluer le contrat social
- Le Fonds de réserve s'épuise vite
- Que dit le commerce extérieur ?
- La guerre a accentué la logique de rente
- La relation avec la Chine est de plus en plus asymétrique, mais c'est un choix stratégique inévitable
- Et dans le reste du monde, qui finance la Russie ?
- Le rôle de l'Asie centrale et du Caucase
En résumé
Le taux de croissance élevé du PIB russe, tout comme les images du sommet des BRICS à Kazan, sont utilisés par Moscou comme des vitrines de l'échec des prévisions occidentales : l'économie russe ne s'est effectivement pas effondrée et n'est pas non plus totalement isolée. Ce n'est pas neutre dans la guerre idéologique que se livrent les grandes puissances, car le thème de la résilience russe a une résonance forte pour toutes les populations travaillées par le ʺdeux poids, deux mesuresʺ : un bon chiffre de croissance est perçu comme une faiblesse de l'Occident, voire une incitation à lui résister.
Donc ne soyons pas naïfs, l'analyse économique fait partie de la guerre hybride, dès lors qu'elle est transformée en ce que les militaires appellent une arène cognitive. Le FMI vient ainsi d'annuler une mission en Russie, après une lettre de protestation de ministres des Finances européens. Cela étant précisé, que peut-on comprendre de ce taux de croissance ? Que nous dit-il de la guerre, de la capacité à la financer et de l'impact de tout cela sur le scénario géopolitique mondial ?
Plus le conflit se prolonge, plus les excédents extérieurs jouent un rôle-clé pour la résilience économique russe, car les ressources internes se raréfient. Les relations avec la Chine et les puissances moyennes sont en réalité une question de survie pour Moscou et c'était cela aussi, l'enjeu du sommet de Kazan. Mais surtout, la dépendance à Pékin s'accroît, ce qui n'a évidemment pas échappé aux stratèges américains – pour lesquels la domination de l'Eurasie reste l'une des clés du ʺGrand Jeuʺ géopolitique (aucun des deux candidats à la présidence n'échappera à cette réalité).
Tania SOLLOGOUB, Economiste