Italie – Une rentrée mitigée

Italie – Une rentrée mitigée

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Dans un contexte toujours incertain, les performances de l’Italie, comparativement aux autres pays de la zone euro, apparaissent plutôt positives. Avec une hausse du PIB de 0,2% au deuxième trimestre par rapport au trimestre précédent, l’économie italienne croît au même rythme que la France, malgré un acquis moins favorable (+0,6% sur 2024), et fait mieux que l’Allemagne, dont le PIB diminue de 0,1% sur le trimestre. Elle fait néanmoins moins bien que l’Espagne, qui se démarque de ses partenaires et continue sur la lancée post-Covid avec une hausse du PIB de 0,8% pour le deuxième trimestre consécutif. Si la comparaison internationale semble pencher en faveur de l’optimisme, le tableau dressé par le détail des comptes est moins rose. La contribution de la demande finale à la croissance est restée limitée à +0,1 point de pourcentage (ppt), tandis que la contribution des stocks a apporté 0,4 ppt à la croissance. Les comptes extérieurs, quant à eux, ont pesé négativement sur la croissance à hauteur de -0,3 point de pourcentage, plombés par une baisse des exportations de 1,5% face à un recul des importations de 0,6%.

En ce qui concerne les grands postes de la demande, il semblerait que la reprise de la consommation ne soit toujours pas au rendez-vous. Les dépenses de consommation des ménages ont ainsi ralenti par rapport au premier trimestre, avec une hausse limitée à 0,2%. Si les dépenses dans les services, en baisse au cours des deux derniers trimestres, ont retrouvé le chemin de la croissance avec une augmentation de 1,3%, la consommation en biens, qui avait soutenu la faible reprise en début d’année, recule ce trimestre. Ce repli est particulièrement marqué dans les dépenses de consommation de biens non durables, qui baissent de 1,4% par rapport au trimestre précédent.

Le ralentissement de l'investissement se poursuit également, passant de 0,4% de croissance d'un trimestre à l'autre au T1 à 0,3% au T2. Alors qu’au cours du premier trimestre, la faiblesse de l'investissement était principalement due au segment des machines et équipements, c'est au tour de la construction de marquer le pas avec une croissance tout juste positive à 0,1%. Le recul attendu dans le secteur du logement se confirme avec une baisse de 1,1%, tandis que les effets du plan de relance continuent de soutenir les investissements en bâtiments et travaux publics. Ceux-ci, bien qu’en ralentissement par rapport au premier trimestre, croissent tout de même de 1,8%, contribuant à hauteur de 0,4% à l’investissement en construction. La croissance des investissements en transport reste vigoureuse, mais les investissements en propriété intellectuelle reculent de 0,9%.

Du côté de l’offre, seules les activités de services et la construction sont en territoire positif. Faisant écho au ralentissement de l’investissement en construction, la croissance de la valeur ajoutée du secteur s'est fortement modérée, passant de 2,9% au T1 à 0,6% au T2. Pour ce qui est des services, la hausse de la valeur ajoutée se poursuit et s’améliore depuis le début de l’année, tirée par les activités immobilières, le commerce de détail et le secteur des Technologies de l'Information et de la Communication (TIC).

Sans surprise, la valeur ajoutée dans l’industrie recule de nouveau et perd près de 1% par rapport au trimestre précédent. Il en va de même pour le secteur agricole, dont la valeur ajoutée baisse de 1,7% après la reprise du T1.

Cette morosité de l’activité semble également se poursuivre au T3. Après quelques mois de hausse, l'indice de confiance des consommateurs a diminué en août, passant de 98,9 à 96,1, en raison d’anticipations moins favorables concernant leur situation économique générale et personnelle. Ce recul intervient alors même que l'inflation annuelle a légèrement décéléré, après le léger rebond enregistré au cours des deux mois précédents dû à la hausse des prix de l’énergie réglementée. Elle passe ainsi de 1,3% en juillet à 1,1% en août, principalement sous l'effet de la baisse des prix des biens énergétiques non régulés (-8,6%) et des biens durables (-1,8%). Toutefois, l'inflation sous-jacente, excluant les prix volatils de l'énergie et des aliments frais, se stabilise à 2,0%. Les tensions dans les secteurs des services (+3,2%) et des biens alimentaires transformés (+1,8%), observées en août, ont été en partie compensées par le recul des prix des biens durables.

Sur le marché du travail, le taux de chômage a diminué à 6,5% en juillet 2024, avec une réduction notable du nombre de chômeurs (-6,1%). Cependant, cette baisse s'accompagne d'une augmentation du nombre d'inactifs (+0,6%), ce qui pourrait indiquer un retrait du marché du travail de certains segments de la population. Bien que l'emploi ait légèrement augmenté (+0,2%), porté par une hausse de l'emploi indépendant et une augmentation chez les femmes, il baisse parmi les salariés et les 25-34 ans, signe que la dynamique reste fragile.

Du côté des entreprises, l'indice de confiance a enregistré une légère augmentation, passant de 94,3 à 94,7, mais il reste bien en deçà de son niveau de janvier.

L'indice de confiance de l’industrie a diminué de nouveau en août après s’être stabilisé en juillet, signe que le secteur est toujours en difficulté. Parallèlement, les prix à la production, tirés par la hausse de l’énergie, ont augmenté de 1,3% par rapport au mois précédent. Hors énergie, les prix n'ont que marginalement progressé (+0,1%). Dans le secteur de la construction, la confiance des entreprises est restée relativement stable, bien qu’elle se soit détériorée dans le segment du logement.

À l'exception du commerce de détail, dont l’indice de confiance fléchit, la confiance dans les services s’est améliorée en août, principalement grâce à la bonne tenue des activités liées au tourisme et aux TIC, qui bénéficient d'une reprise de la demande.

 

Article publié le 6 septembre 2024 dans notre hebdomadaire Monde – L’actualité de la semaine

Italie – Une rentrée mitigée

Malgré des prix en nette décélération et des salaires négociés qui croissent à un rythme supérieur à celui des prix à la consommation, la reprise de la consommation ne semble pas être au rendez-vous, avec des anticipations des ménages qui se dégradent de nouveau. L’impact du ralentissement sur l’emploi, bien qu’il ne se matérialise pas encore sur les nouvelles embauches et le taux de chômage, reste préoccupant au regard de la hausse du nombre d'actifs quittant le marché du travail. Dans ce contexte de demande en berne, les ressorts d’une reprise de l’investissement, dans une conjoncture où les perspectives des entreprises sont encore orientées à la baisse, ne sont pas non plus pour bientôt, d’autant que les effets de la baisse des taux ne devraient pas se manifester dans l’immédiat. En somme, même si l’économie italienne ne décroche pas de ses partenaires, le second semestre s’annonce plus morose qu’attendu.

Sofia TOZY, Economiste, Italie