Les analystes financiers semblent déceler dans la croissance américaine actuelle plusieurs signaux évoquant une évolution en forme de « K » susceptible de compliquer les décisions de politique monétaire de la Fed.
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Les analystes financiers semblent déceler dans la croissance américaine actuelle plusieurs signaux évoquant une évolution en forme de « K » susceptible de compliquer les décisions de politique monétaire de la Fed. Ce schéma traduit une dissociation des trajectoires économiques selon le patrimoine des agents. Alors que la branche montante du K illustre une croissance sensible de l’enrichissement d’une faible partie de la population ou de certains secteurs, la branche descendante représente, quant à elle, l’appauvrissement d’autres groupes. Les données de l’enquête sur les dépenses de consommation du Bureau of Labor Statistics soulignent que les 20% les plus riches concentrent 40% de la consommation totale alors que les 20% les plus pauvres n’en représentent que 9%. Parallèlement, les statistiques de la Fed indiquent un renforcement de la richesse détenue par les 10% les plus aisés au deuxième trimestre 2025. Ces ménages aisés sont présumés contribuer à une part croissante de l’activité économique à travers leurs dépenses : une hypothèse néanmoins plutôt optimiste car, à partir d’un certain niveau de richesse, le supplément de revenu et/ou effet de richesse favorable peuvent ne pas susciter de surcroît substantiel de consommation ou d’investissement. A contrario, lestés par la stagnation des revenus réels et leur niveau d’endettement, les ménages les plus modestes sont susceptibles de voir leur consommation très contrainte. Cette dualité rend l’économie américaine particulièrement vulnérable à un choc sur les marchés financiers. Elle complique également les décisions de politique monétaire. Une baisse des taux d’intérêt pour soutenir l’emploi pourrait soutenir les marchés actions et stimuler l’inflation dans les secteurs de la « nouvelle économie », tandis qu’une hausse des taux contiendrait l’inflation, mais pénaliserait les secteurs traditionnels en difficulté.
Du point de vue des données macroéconomiques, les ventes au détail américaines ont très faiblement augmenté sur un mois (+0,2% en septembre après +0,6% en août). Cette progression s’explique principalement par l’augmentation des prix de vente.
Le nombre de nouvelles demandes d'allocations chômage a baissé de 6 000 sur la semaine, s'établissant à 216 000, ce qui confirme la faiblesse persistante des licenciements dans un contexte où la création d'emplois reste morose. Les politiques commerciales et migratoires du président Trump semblent avoir suscité des comportements d’attentisme chez les entreprises, qui se montrent réticentes aussi bien à recruter qu'à réduire leurs effectifs. Cette dépression du marché du travail, avec un taux de chômage faible mais au plus haut depuis quatre ans (4,4% en septembre), semble commencer à pénaliser la consommation. De plus, l’indice des prix à la production a augmenté de 2,7% en rythme annuel en septembre, après 2,6% le mois précédent, tiré par les produits énergétiques et les biens, tandis que les prix des services sont restés stables : cela suggère une inflation plus résistante qu’il n’est souhaitable à ce stade du cycle.
Malgré l’inflation, les investisseurs anticipent une baisse des taux de 25 points de base en décembre, avec une probabilité de 85%. Le secrétaire au Trésor a d'ailleurs annoncé qu'une nomination du nouveau président de la Fed pourrait intervenir d'ici Noël.
En zone euro, l'indicateur de confiance économique témoigne d’une croissance qui se poursuit mais qui reste modeste : il progresse légèrement à 97 points, porté par les services et la construction, mais l'industrie continue de reculer, tandis que la confiance des consommateurs est stable.
Par ailleurs, la réduction des droits de douane sur l’acier et l’aluminium, actée par l’accord commercial entre les États-Unis et l’Union européenne en juillet dernier, pourrait être remise en cause ou du moins retardée. Les États-Unis conditionnent en effet ces allégements à une révision préalable des règles encadrant les services numériques européens. Le bras de fer commercial semble donc durer plus longtemps que prévu.
Les marchés actions mondiaux se sont redressés la semaine dernière, le S&P500 a progressé de 3,2% et l’Euro Stoxx 50 de 2,3%, mais restent en baisse sur un mois. Sur les marchés obligataires, les rendements des obligations souveraines à 10 ans américaine et allemande ont légèrement baissé dans la perspective très attendue d’une baisse des taux de la Fed en décembre. Les primes de risque française et italienne face au Bund allemand se sont resserrées. L’euro s’est légèrement apprécié face au dollar (+0,6%). Enfin, le prix du baril de pétrole en mer du Nord a augmenté de 1,6%
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